Plusieurs incitatifs fiscaux prendront fin ou seront modifiés dans les prochaines semaines, voici plus de détails :
Fin de la passation en charge des immobilisations
Depuis maintenant un peu plus de 2 ans, les sociétés privées sous contrôle canadien (SPCC) peuvent profiter d’un amortissement de 100 % des immobilisations acquises durant l’année, exception faite, entre autres, des bâtiments, et ce, jusqu’à concurrence de 1 500 000 $ d’acquisitions dans leur groupe de sociétés associées.
L’important à retenir ici est que l’immobilisation ne doit pas être seulement commandée ou acquise avant le 1er janvier 2024, mais elle doit également être mise en service avant cette date. De plus, les biens neufs et ceux usagés sont admissibles, mais pour ces derniers, ils doivent être acquis de personnes non liées.
Cet incitatif permet de récupérer plus rapidement de l’impôt qui normalement est récupéré sur plusieurs années. Cela peut donc avoir un effet immédiat sur les liquidités de votre société. Un des principes de base en fiscalité, encore plus d’actualité aujourd’hui avec l’inflation et les taux d’intérêt élevés, est que « l’argent d’aujourd’hui vaut plus que celui de demain ».
Par exemple, si vous décidez d’acquérir du mobilier, de l’outillage, du matériel roulant, etc. pour un total de 250 000 $ avant le 1er janvier 2024 et que tout est en service avant cette date, vous pourrez déduire 250 000 $ immédiatement contre vos revenus de société au lieu de le déduire à 20 ou 30 % dégressivement au cours des années (250 000 $ à 20 % = 50 000 $ l’année 1 ; (250 000 – 50 000) à 20 % = 40 000 $ l’année 2), etc.
Ainsi, si vos taux d’imposition corporatifs combinés sont de 26,5 %, on parle d’une récupération immédiate d’impôt de 66 250 $ au lieu de 13 500 $ l’année 1, de 10 600 $ l’année 2, etc.
Fin de la déduction additionnelle pour amortissement de 30 % au Québec
Cette mesure a été instaurée en 2018 et permet de déduire un 30 % supplémentaire d’amortissement au Québec seulement, et ce, l’année suivant celle où de l’amortissement a été pris sur le bien visé. On se retrouve donc à déduire 130 % du coût de l’immobilisation.
Contrairement à la passation en charge qui touche un très large inventaire d’immobilisations, cette déduction vise principalement les mêmes biens que ceux pour lesquels on peut réclamer un C3i. On parle ainsi surtout de matériel de fabrication et de transformation ou de matériel informatique. Pour y avoir droit avant son abolition, le bien doit être neuf et acquis avant le 1er janvier 2024.
Dépendamment du taux d’imposition de votre société, cet amortissement supplémentaire fait en sorte que vous pouvez recouvrir environ 1 % à 3 % du coût de votre investissement. Par exemple, pour l’acquisition d’un équipement de fabrication et transformation de 100 000 $, on parle d’environ 1 000 $ à 3 000 $ de retour en impôt.
Comme il vise pratiquement les mêmes biens que le C3i, on peut très bien combiner ces deux incitatifs.
Réduction des taux du crédit relatif à l’investissement et à l’innovation (C3i), mais prolongation de l’admissibilité jusqu’au 31 décembre 2029
Le ministre des Finances du Québec, lors de son énoncé économique du 7 novembre 2023, a modifié plusieurs paramètres d’applications du C3i.
En voici un bref résumé des principaux changements :
1- Réduction des taux du crédit qui était au minimum de 20 % et au maximum de 40 % à un minimum de 15 % et à un maximum de 25 % et ce, selon le territoire où le bien est utilisé. Cette réduction prend effet pour les biens dont l’entente d’acquisition a été conclue après le 31 décembre 2023 ou dont la construction s’est terminée après le 31 mars 2024;
2- Prolongation de 5 ans du crédit, passant du 31 décembre 2024 au 31 décembre 2029 comme date limite pour acquérir un bien admissible;
3- Abolition des critères de remboursabilité du crédit pour les exercices ouverts après le 31 décembre 2023. Ainsi, le crédit devient pleinement remboursable pour tous;
4- Modifications d’éléments techniques afin de faciliter les demandes et récupérer certains montants pouvant avoir été refusés depuis l’entrée en vigueur du C3i.
Afin que vous puissiez comprendre davantage le C3i, voici quelques informations supplémentaires.
Tout d’abord, il faut mentionner que toutes les entreprises qui ont un établissement au Québec et y exploitent une entreprise peuvent avoir droit au C3i. De plus, le C3i est composé de deux grandes catégories de biens admissibles, soit :
1- Le matériel de fabrication et transformation
2- Le matériel informatique incluant les progiciels de gestion
Concernant le matériel de fabrication et transformation, il est bon de mentionner que le C3i peut être admissible pour votre entreprise même si elle n’est pas directement catégorisée comme une société manufacturière. Le critère le plus important est que le bien acquis doit être utilisé à plus de 50 % dans une étape de transformation et/ou de fabrication de biens destinés à la vente ou à la location. Ainsi des restaurants, des épiceries, des carrières et biens d’autres peuvent y avoir accès. Comme chaque cas est unique, nous serons en mesure de valider avec vous votre admissibilité.
Pour ce qui est du matériel informatique incluant les progiciels de gestion, toutes les sociétés sans exception peuvent y avoir droit et il n’y a pas de critère de fabrication et transformation d’un bien à vendre ou à louer à rencontrer. On y retrouve le plus souvent des serveurs, des logiciels « ERP » (enterprise ressource planning) ou « CRM » (customer relationship management). Les ordinateurs sont admissibles, mais comme leurs coûts individuels sont très souvent inférieurs à 5 000 $, aucun montant de crédit n’est possible, comme expliqué dans le prochain paragraphe.
Parmi les autres critères importants, il convient de mentionner que le bien doit être neuf, utilisé uniquement (1) au Québec et acquis avant le 1er janvier 2030. De plus, les frais en lien avec son acquisition doivent être engagés aussi avant le 1er janvier 2030 et seul l’excédent de 12 500 $ pour le matériel de fabrication et transformation, et de 5 000 $ pour le matériel informatique ou les progiciels de gestion, sont des frais admissibles au crédit.
Le taux varie selon le territoire où le bien est utilisé :
Territoire à haute vitalité économique : Communauté métropolitaine de Québec ou de Montréal. Le taux est de 20 % jusqu’au 31 décembre 2023 et de 15 % par la suite.
Territoire à faible vitalité économique : Plusieurs municipalités sont visées ici, mais on retrouve majoritairement des municipalités situées dans les régions administratives du Bas St-Laurent et de la Gaspésie-Île-de-la-Madeleine. Notons aussi qu’on y retrouve la MRC des Appalaches ainsi que la MRC des Etchemins. Le taux est de 40 % jusqu’au 31 décembre 2023 et de 25 % par la suite.
Territoire à vitalité économique intermédiaire : Tout ce qui n’est pas inclus dans un territoire à haute et faible vitalité économique. Le taux est de 30 % jusqu’au 31 décembre 2023 et de 20 % par la suite.
Une fois qu’on se qualifie au regard des critères de base, plusieurs questions demeurent en suspens et comme le veut le dicton : le diable est dans les détails! Ne prenez pas le risque de passer à côté ou de vous faire refuser un tel crédit!
Nous sommes là pour répondre à vos questions, telles que :
- Quand est-on considéré avoir engagé une dépense?
- Quand un bien est-il considéré comme acquis?
- J’acquiers un bien usagé, peut-il être admissible?
- J’ai reçu un produit d’assurance afin d’acquérir un nouvel équipement, ai-je droit au crédit?
- Je construis une nouvelle bâtisse ou section à une bâtisse existante, suis-je admissible ?
- Je construis un équipement à l’interne, le temps de main-d’œuvre, les pièces et autres frais connexes, sont-ils admissibles ?
- Outre la facture de mon équipement, qu’est-ce qui entre dans le coût de mon bien et qui est admissible au crédit ?
- Mon entreprise fabrique et installe ce qu’elle fabrique, ai-je un risque de refus? Si oui, comment puis-je l’atténuer?
- Mon entreprise fabrique et répare des biens appartenant à mes clients, puis-je demander quelque chose?
- Je suis un sous-traitant d’une entreprise qui fabrique des biens qu’elle vend, comme je ne vends pas de bien directement, puis-je y avoir droit?
Cette liste de questions peut vous sembler longue, mais elle est loin d’être exhaustive. Il est primordial d’analyser votre situation selon les faits propres à votre entreprise avant de conclure quoi que ce soit et il y a plusieurs éléments à prendre en considération afin de s’assurer d’optimiser votre demande de crédit.
Plusieurs stratégies mises de l’avant par nos spécialistes pourront faire en sorte d’optimiser davantage vos réclamations et vous assurer de réclamer tout ce à quoi vous avez réellement droit.
Notez que le présent texte se veut être un résumé et ne remplacera jamais une bonne discussion avec l’un de nos professionnels BVA. Pour toute question, n’hésitez pas à communiquer avec nos spécialistes en incitatifs fiscaux.
Pierre Girard, CPA
Directeur principal au développement de la conformité fiscale